Ryann Mason : Infirmière en fauteuil roulant

Le métier d’infirmière est l’un des plus difficiles qui soit parce qu’il est, par moments, exigeant tant physiquement que mentalement. Les infirmières sont la colonne vertébrale des systèmes de santé de partout dans le monde. Le degré de compassion dont elles font preuve et la quantité de soins qu’elles prodiguent chaque jour sont exceptionnels ! Imaginez-vous, un instant, faire ce métier en fauteuil roulant, en composant avec tous les défis que pose la vie avec un handicap.

Maintenant, laissez-moi vous présenter Ryann Mason. Ryann est une infirmière autorisée qui se déplace à bord d’un Apex C

et qui défend les intérêts des personnes handicapées. Elle travaille depuis quinze ans dans le système de la santé, dont huit à titre d’infirmière autorisée. Ryann vit avec le syndrome d’Ehlers-Danlos, une dysfonction génétique du tissu conjonctif qui provoque une élasticité excessive du collagène. Elle est également atteinte de dysautonomie, un dysfonctionnement du système nerveux autonome, dont le rôle est de veiller au maintien des fonctions involontaires, c’est-à-dire ce qui se produit sans qu’on y pense, comme la respiration.

« Quand j’étais jeune, je ne savais pas que j’étais handicapée. Je croyais que j’étais juste très maladroite parce que je trébuchais constamment, je tombais, je me foulais les chevilles et je me luxais les épaules. Et personne ne s’en souciait, car j’étais un véritable garçon manqué et je me tiraillais tout le temps avec les garçons. »

Ryann a reçu son diagnostic du syndrome d’Ehlers-Danlos à l’âge de 16 ans seulement. À l’époque, elle était très active : elle pratiquait la danse et les arts martiaux. Quand le diagnostic est tombé, les médecins ont dit à ses parents qu’elle devait arrêter de danser et qu’elle aurait besoin d’un fauteuil avant l’âge de 20 ans.

Motion Composites : Pouvez-vous nous parler un peu de vous ? Pourquoi avez-vous décidé de devenir infirmière ? Parlez-moi un peu de cette vie.

Ryann Mason : Une fois, j’étais aux urgences avec ma mère pour une énième fois parce que je n’arrêtais pas de me luxer différentes parties du corps. Cette fois-là, ma mère m’a dit : « Tu sais, tant qu’à te présenter si souvent aux urgences, autant te faire payer pour pousser la civière. » Je lui ai tout de suite rappelé à quel point je voulais devenir une danseuse professionnelle et fouler les scènes de Broadway.

Mais j’aime les défis. Alors, j’ai décidé d’essayer. J’ai participé à une journée portes ouvertes, puis je me suis inscrite au programme. J’ai obtenu mon diplôme de technicienne ambulancière paramédicale à 16 ans. Je suis tombée complètement amoureuse de la médecine d’urgence !

J’ai quand même essayé de devenir danseuse professionnelle. Mais à mi-chemin du programme universitaire, j’ai dû admettre que ça n’allait pas se produire. Alors, je suis retournée dans le domaine de la santé. J’ai étudié la sexualité humaine, ce qui explique pourquoi je publie tant de contenu sur les handicaps et la sexualité dans les médias sociaux. Puis, je suis retournée à l’école de soins infirmiers et j’ai obtenu le titre d’infirmière autorisée à l’âge de 21 ans.

À l’époque, j’avais encore toute ma mobilité. J’utilisais parfois une canne, quand ça allait moins bien, mais je me gardais bien de le faire au travail. Tout allait plutôt bien jusqu’à mes 26 ans, période à laquelle j’ai commencé à me servir d’un fauteuil roulant à temps plein. Mon risque de faire une chute était alors énorme. Les luxations que j’avais subies à répétition avaient complètement détruit tout le cartilage à l’intérieur de mes hanches, de mes genoux et de mes chevilles.

À ce moment-là, je travaillais déjà depuis cinq ans comme infirmière aux urgences. Je voulais devenir une infirmière navigante (et travailler à bord d’un hélicoptère) ! Pendant que j’essayais de trouver comment réaliser ce projet et composer avec ma vie d’utilisatrice de fauteuil roulant à temps plein, j’ai accepté un poste de responsable de cas (dont les tâches ressemblent à celles du travailleur social). J’ai gardé cet emploi trois ans, jusqu’à ce que la pandémie survienne. Là, je me suis rendu compte que j’avais accumulé beaucoup de frustrations et que je voulais recommencer à aider les gens directement. Mais je ne savais toujours pas comment j’allais pouvoir y arriver en fauteuil roulant.

J’ai repris le métier d’infirmière auxiliaire et je me suis aperçu que je pouvais faire bien plus que ce que j’avais imaginé. Alors, j’ai postulé pour quelques postes d’infirmière soignante et j’ai presque immédiatement commencé à travailler comme infirmière en soins postnataux. J’ai adoré ça ! Ce genre de travail, auprès des patients, était tellement gratifiant ! C’est aussi à cette époque que ma copine et moi avons décidé de déménager à San Diego, en Californie.

Quand nous sommes arrivées là-bas, le seul poste d’infirmière que j’ai pu obtenir en attendant le transfert de mon permis d’infirmière en Californie a été celui d’infirmière dans une école primaire. J’ai adoré ça. C’était génial ! Le salaire, par contre, n’était pas terrible. Je me suis donc dit que ce serait temporaire.

 Récemment, j’ai commencé à travailler comme gestionnaire de cas en hôpital. Ce n’est pas facile, mais c’est formidable ! Je suis tellement contente d’avoir pu retourner travailler en hôpital.

 

MC : À quoi ressemble la journée typique au travail d’une infirmière ?

RM : Je vais vous parler de mon dernier emploi comme infirmière dans une école primaire. J’aimerais beaucoup vous parler de mon expérience parce que ce travail n’avait rien d’ennuyant. Beaucoup d’infirmières et de gens qui ne travaillent pas dans le domaine de la santé pensent que le travail d’une infirmière en milieu scolaire se résumer à appliquer des pansements et de la glace. Mais il n’y a rien de plus faux ! Chaque jour avec ces enfants était une aventure.

Et c’était la première fois qu’on ne remettait pas en question mes compétences seulement parce que j’étais en fauteuil roulant. Chaque enfant qui passait pour la première fois la porte de mon bureau me demandait systématiquement pourquoi j’étais en fauteuil roulant. Je lui expliquais que j’étais née avec un handicap qui rendait mes jambes plus faibles que les siennes et que j’avais besoin du fauteuil pour être l’infirmière la plus rapide qui soit. L’enfant riait et n’avait rien à ajouter. Le sujet était clos. Aucun ne m’en reparlait, sauf quand je changeais une couleur ou autre chose sur mon fauteuil.

C’était réconfortant de savoir que ces enfants ne se souciaient pas du dysfonctionnement de mes jambes. Ils voulaient seulement que je m’occupe d’eux. Ils avaient besoin de quelqu’un qui savait quoi faire en cas d’urgence. Mon apparence, la couleur de mes cheveux ou même la personne avec qui je partageais ma vie ne leur importaient pas. Ils avaient besoin de soins et d’amour. Tout ça me rappelait exactement pourquoi j’avais choisi le domaine de la santé.

J’étais aussi heureuse de pouvoir tirer profit de mon expérience de personne ayant grandi en situation de handicap. Je sais ce que c’est que d’aller constamment aux urgences. Je parviens à les calmer parce que je sais à quel point ces situations peuvent être effrayantes. Cette expérience fait de moi une meilleure infirmière.

 

MC : A-t-on déjà remis en doute vos compétences en soins infirmiers parce que vous êtes en fauteuil roulant ? Si c’est le cas, qu’avez-vous répondu ?

RM : Je vais vous donner un exemple. Quand j’étais gestionnaire de cas (le premier emploi que j’ai occupé en fauteuil roulant), je devais rencontrer tous les patients qu’on m’avait confiés sur l’étage où je travaillais, à l’hôpital. J’évaluais leur façon d’évoluer à la maison afin de déterminer s’ils avaient besoin d’appareils médicaux, s’ils devaient aller vivre dans un centre d’hébergement et de soins de longue durée ou s’ils avaient besoin d’un fauteuil roulant. C’était à moi de prendre ce genre de décision. Et je travaillais en collaboration avec leur médecin pour m’assurer de leur fournir ce dont ils avaient besoin. Je passais donc sans arrêt d’une chambre à l’autre à l’hôpital, à bord de mon fauteuil roulant.

La plupart des personnes âgées provenant des milieux ruraux me répondaient : « Mon enfant, je pense que ce lit te serait plus utile qu’à moi. » Ou alors elles s’inquiétaient, pensant qu’il m’était arrivé quelque chose cette journée-là. Heureusement, quand j’occupais ce poste, peu de gens ont refusé que je m’occupe d’eux.

Quand je travaillais comme infirmière soignante en soins postnataux, j’ai dû composer avec quelques parents — qui ne me connaissaient pas ou qui n’avaient jamais eu de contact avec une personne handicapée — qui hésitaient à me laisser prendre leur bébé. Ce genre de situation était difficile parce que soulever les nouveau-nés faisait partie intégrante de mon travail. C’était plutôt rigolo quand ils me voyaient prendre soin des autres nourrissons à la pouponnière, quand ils voyaient les autres infirmières venir me consulter, car j’étais l’infirmière en chef. C’est là qu’ils s’apercevaient qu’ils pouvaient me faire confiance.



Au fil du temps, je me suis trouvé des trucs pour aider les gens à me comprendre et à comprendre ma façon de travailler. Mes patients sont conscients et alertes. Ils me parlent. Alors, c’est souvent moi qui brise la glace et qui aborde le sujet. Certains de mes patients m’ont trouvé sur Internet et m’ont dit tout le réconfort qu’ils trouvaient à l’idée de savoir que je savais par quoi ils passaient parce que j’avais déjà, moi aussi, passé du temps sur un lit d’hôpital. Je pense que tout ça fait de moi une meilleure infirmière ! Je leur parle de mon handicap, de ses causes et des raisons qui expliquent pourquoi mon handicap fait de moi une bonne infirmière. Après ce genre de conversation, les patients ne remettent plus en question mes compétences.

 

MC : Comment votre APEX C vous aide-t-il à accomplir vos tâches au travail ?

RM : : À cause de mon handicap, je ne peux pas lever de lourdes charges sans me luxer les épaules. Avant, peu importe le fauteuil roulant que j’utilisais, j’étais pratiquement incapable d’effectuer des transferts. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui ! Je n’ai jamais eu de fauteuil aussi léger que mon Apex Carbone !

Je suis une femme incroyablement indépendante. Je veux être capable de me déplacer seule sans m’inquiéter du fait que mon fauteuil roulant pourrait nuire à mon autonomie. L'Apex C me permet de faire ce que je veux, l’esprit tranquille !

Enfin, si l'Apex C me convient autant, c’est aussi en raison de sa taille et de son format. C’est le fauteuil idéal pour toute personne qui travaille dans le domaine de la santé. Il est suffisamment compact pour que je puisse me déplacer dans les chambres d’hôpital, même à l’intérieur de celles qui ne sont pas à proprement parler accessibles en fauteuil roulant !

 

MC : Que recommanderiez-vous à d’autres utilisateurs ou utilisatrices de fauteuil roulant qui aimeraient travailler en soins infirmiers ou dans une autre branche du domaine de la santé ?

RM :

Gardez toujours à l’esprit les raisons qui ont motivé votre choix de faire ce métier en particulier, car votre parcours ne sera pas un long fleuve tranquille. Si vous n’êtes pas absolument certain de vouloir suivre cette voie, vous risquez de vous laisser abattre par des commentaires comme : « Non, tu ne peux pas faire ça parce qu’on n’a jamais rien vu de tel auparavant. » Vous devez trouver une manière d’intégrer votre handicap à votre carrière.

Ce n’est pas parce que certaines personnes n’ont jamais vécu une expérience donnée qu’elle n’existe pas. Vous possédez une expérience de vie en situation de handicap. Et cette expérience vous permettra de donner à vos patients bien plus que vous ne sauriez l’imaginer. J’utilise mon vécu pour aider les miens à obtenir l’aide et les soins dont ils ont besoin et j’en ressors chaque fois grandie. Peu importe les difficultés que j’ai dû surmonter, ça en a largement valu la peine ! Je ne changerais pas de métier pour rien au monde.


Nous tenons à remercier Ryann de nous avoir parlé de son parcours et de la façon dont elle a marqué la vie de milliers de gens, tant par son action dans les médias sociaux que par son travail d’infirmière ! Suivez Ryann sur Facebook et Instagram pour en savoir plus sur sa vie. N’hésitez pas à lui écrire si vous envisagez de faire carrière en santé. C’est un chemin peut-être difficile, mais certainement pas impossible !

À propos de Miriam Aguilar Garza

Spécialiste en marketing digital à Motion Composites

Miriam est titulaire d’une Baccalauréat en gestion des affaires internationales de l’Universidad Autónoma de Nuevo León (Mexique). Elle est passionnée par la rédaction, la lecture, les voyages et le désir de donner une voix à la communauté des personnes en fauteuil roulant.